55_2021-2022/56 - Améliorer la législation sur le contrôle coercitif, une forme de violence familiale
Pétitions
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55_2021-2022/56 - Améliorer la législation sur le contrôle coercitif, une forme de violence familiale
Il est demandé à la Chambre d'améliorer la législation relative au contrôle coercitif, une forme de violence familiale.
Cette pétition a reçu une réponse:
Lors de sa réunion du 9 avril 2025, la commission des Pétitions a transmis cette pétition à la commission de la Justice et à la ministre de la Justice, chargée de la Mer du Nord.
Réponse de la ministre de la Justice, chargée de la Mer du Nord (12/09/2025) :
Je vous remercie pour votre courrier, que j'ai lu avec beaucoup d'attention. Avant toute chose, je tiens à exprimer ma sympathie et ma compréhension à toutes les victimes de violence intrafamiliale, qu'elle qu'en soit la cause. Dans l'accord de gouvernement et dans ma note de politique générale, nous avons accordé une place centrale aux victimes. Nous continuons à nous engager à lutter fermement contre toutes les formes de violence, y compris la violence psychique.
Je voudrais répondre spécifiquement à certaines de vos questions et, dans la mesure du possible, apporter quelques nuances. La violence intrafamiliale est en effet un phénomène très complexe, qui implique un enchevêtrement difficile à démêler de relations tourmentées et de personnes blessées. Aborder cette problématique, tant du point de vue de l'aide que de la Justice, est en soi une mission difficile. Depuis plusieurs années, la violence intrafamiliale fait l'objet d'une attention particulière auprès de la Justice et de l'ensemble des autorités compétentes. Plusieurs évolutions ont eu lieu dans ce domaine et je présente ci-dessous quelques initiatives déjà prises.
Depuis 2001, la Belgique a concrétisé et structuré sa politique en matière de violence entre partenaires par le biais d'un plan d'action national (PAN). La prévention, la protection ainsi que l'accueil des victimes et le suivi des auteurs ou encore la mise en œuvre d'une politique criminelle efficace figurent parmi les principaux objectifs de ce PAN. La Justice est l'un des nombreux partenaires qui collaborent à l'élaboration de ces plans d'action. Un PAN de lutte contre les violences basées sur le genre 2021-2025 est en cours d'application.
Depuis 2006, deux circulaires de politique criminelle en la matière ont été publiées, à savoir la COL 04/2006 relative à la politique criminelle en matière de violence dans le couple (révisée en 2015) et la COL 03/2006 sur la définition de la violence intrafamiliale et de la maltraitance d'enfants extrafamiliale, l'identification et l'enregistrement des dossiers par les services de police et les parquets. La circulaire COL 03/2006 considère comme violence intrafamiliale « toute forme de violence physique, sexuelle, psychique ou économique entre membres d'une même famille, quel que soit leur âge». La circulaire COL 04/2006 définit la violence dans le couple comme : « toute forme de violence physique, sexuelle, psychique ou économique entre conjoints, cohabitants ou personnes ayant cohabité et entretenant ou ayant entretenu une relation affective et sexuelle durable. » En d'autres termes, dans le cadre du fonctionnement des forces de police et des directives en matière de poursuite adressées aux parquets, les formes de violence psychique sont déjà prises en considération dans les contextes de violence intrafamiliale et de violence dans le couple depuis 2006.
A ce jour, notre Code pénal ne prévoit toutefois pas encore d'incrimination distincte de la violence psychique. Sur la base des circulaires susmentionnées, nous pouvons toutefois citer un certain nombre d'incriminations possibles en matière de violence psychique, à savoir les injures, la calomnie, le harcèlement et les menaces. Toutefois, avec l'introduction du droit pénal sexuel en mars 2022 et du nouveau Code pénal en février 2024 (qui entrera en vigueur en avril 2026), nous avons été davantage attentifs au contexte intrafamilial dans lequel les infractions sont commises et y avons également associé des alourdissements de peine. En outre, nous avons inclus une définition claire de la notion de «partenaire» dans le Code pénal, de sorte qu'elle englobe également les ex-partenaires, et nous avons également élargi l'infraction de harcèlement, de sorte que non seulement les perturbations répétées de la tranquillité, mais aussi une perturbation ponctuelle de la tranquillité, entrent désormais clairement dans le champ d'application de l'incrimination. Les juges ont donc de plus en plus d'options à leur disposition pour imposer des peines plus sévères pour ce type de faits.
Depuis la loi du 31 juillet 2020, tous les magistrats sont également obligatoirement formés sur les thèmes des violences intrafamiliales et sexuelles. Ces formations sont organisées par l'Institut de formation judiciaire (IFJ) et visent principalement à donner aux juges et aux magistrats de parquet une meilleure compréhension des faits de violence intrafamiliale et sexuelle, de maltraitance des enfants, etc. Lors de ces formations, des experts expliquent aux magistrats les différents niveaux de violence, y compris la violence psychique, les manipulations et le « contrôle coercitif». Ces types d'infractions sont souvent très stratifiés et complexes, et il est souvent très important de mieux connaître non seulement l'aspect juridique de l'affaire, mais également les mécanismes et formes sous-jacents, afin de mieux comprendre l'affaire et d'infliger une peine plus appropriée. Ainsi, outre une peine d'emprisonnement, il est également possible d'opter pour une peine de probation ou une suspension probatoire, où la personne condamnée doit respecter un certain nombre de conditions qui peuvent notamment consister à suivre une thérapie.
Ainsi, sur le terrain, les services de police et les magistrats sont conscients depuis plusieurs années des problèmes et de la dynamique toxique du contrôle coercitif dans le cycle de la violence dans le couple. Un autre exemple est la COL 15/2020, qui a introduit un outil d'évaluation des risques pour les services de police et pour les services de première ligne effectuant des interventions dans le contexte de situations de violence dans le couple. Cet outil d'évaluation des risques ou check-list, qui s'appuyait déjà sur d'autres connaissances scientifiques, identifie également les situations de violence psychique, de contrôle excessif et de domination comme des facteurs de risque possibles d'escalade de la violence dans le couple.
En attendant, nous disposons déjà d'une législation, même si elle n'est pas strictement pénale, qui définit le contrôle coercitif. Il s'agit de la loi du 13 juillet 2023 sur la prévention et la lutte contre les féminicides et les homicides fondés sur le genre. Il ne s'agit pas d'une loi pénale, mais d'une loi-cadre destinée à fournir un cadre général pour la lutte et la prévention des féminicides et des meurtres fondés sur le genre, ainsi que des violences qui les précèdent. Cette loi s'adresse à toutes les personnes du secteur public, y compris les organismes publics, ainsi qu'à toutes les autorités administratives et judiciaires qui doivent respecter les objectifs de cette loi dans le cadre de toute mesure, décision ou politique. Cette loi définit la violence psychique comme « toute violence qui cause un dommage psychique, ou qui vise à causer un dommage psychique et qui peut prendre la forme, entre autres, du contrôle coercitif, de la diffamation, d'insultes verbales et de harcèlement». La notion de contrôle coercitif y est également définie comme « les comportements coercitifs ou de contrôle, continus ou répétés, qui causent un dommage psychique». Le comportement coercitif est défini comme « un acte ou une série d'actes d'agression, de menaces, d'humiliation et d'intimidation ou d'autres abus utilisés pour blesser, punir ou effrayer la victime». Le comportement contrôlant fait également l'objet d'une définition claire, à savoir « un ensemble d'actes visant à rendre une personne subordonnée ou dépendante en l'isolant de ses sources de soutien, en exploitant ses ressources et ses capacités à des fins personnel/es, en la privant des moyens nécessaires à son indépendance, à sa résistance et à sa fuite, ou en réglementant son comportement quotidien».
Cette loi envisage également un outil uniforme d'évaluation des risques, l'objectif étant que toutes les plaintes, tous les signalements, toutes les déclarations ou toutes les procédures liés à ce type de violence dans le couple utilisent un outil uniforme d'évaluation et de gestion des risques. Cet outil d'évaluation et de gestion des risques tiendra compte de l'intégration d'une perspective de genre et d'une perspective intersectionnelle. Actuellement, mes services participent à des discussions en vue de mettre au point un tel outil, qui s'inspire déjà de l'outil d'évaluation des risques de la COL 15/2020 décrite ci-dessus, ainsi que d'autres nouveaux concepts tels qu'ils sont actuellement utilisés, par exemple, dans les « Veilige Huizen » (refuges) en Flandre, ainsi que de nouvelles recherches scientifiques menées par l'Institut pour l'égalité des femmes et des hommes, qui ont débouché sur la publication « Outils de détection du contrôle coercitif. Guide destiné à la police, aux services d'aide aux victimes et aux intervenant·es psychosociaux de la première ligne et guide destiné aux psychologues clinicien·nes », à consulter sur le site de l'Institut.
Comme vous pouvez le lire, nous travaillons depuis de nombreuses années à la lutte contre la violence intrafamiliale et dans le couple, en collaboration avec tous les partenaires impliqués sur le terrain et à différents niveaux politiques. Les esprits s'ouvrent également de plus en plus aux diverses dynamiques qui sous-tendent la violence dans le couple, y compris, par conséquent, la violence psychologique et, en particulier, le contrôle coercitif. Nous continuons à travailler sur ce point dans l'espoir que les services de police et la Justice apporteront de bonnes réponses, non seulement en termes d'accueil des victimes et de sanction et de poursuite des auteurs, mais aussi pour prévenir l'escalade de la violence.
Veuillez agréer, Madame, l'assurance de ma considération distinguée,
Annelies Verlinden
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